Entendez-vous souffler ce vent norvégien, porteur d'un secret vieux de 3 000 ans ? Il contourne les géantes rocailleuses, défie les forêts de sapins et les eaux troublées, urgé de vous transmettre son témoignage... car aux frontières de Bergen, autrefois préservé dans des glaciers, le livre de La Völva a été ouvert. Les âmes des divinités et autres créatures nordiques prisonnières de ses pages peuvent dorénavant être relâchées sous le ciel, pour répondre à la promesse de l'inéluctable.
Le destin déploie sa main et vous dévoile son jeu, et quand vos yeux constatent votre défaite, vous comprenez enfin la vanité de votre combat.
Intrigue en cours — Le temps est bien choisi pour vous duper : Le destin vous punis d’avoir voulu vous en détourner, entendez-vous son rire moqueur ?... Sachez que jamais il ne vous laissera en paix.
NB — Forum inspiré de la mythologie nordique | divinités et créatures mythiques réincarnées. Nous sommes en automne 2020 ; rps ultérieurs à la date actuelle prohibés, mention "flashback" pour les rps antérieurs.
Je regarde platement le réveil éclaté contre le mur pendant que je finissais de me préparer pour mon rendez-vous. Heureusement que mon hôte était quelqu’un d’organisé, je n’avais qu’a me référer à son agenda pour me tenir à son emploi du temps, connaitre ses différents rendez-vous et éviter d’attirer les soupçons. Les soupçons de quoi ou de qui, aucune idée, mais dans tous les cas si je voulais éviter de finir enfermée dans un asile autant se tenir tranquille plutôt que de clamer être une elfe à tous les coins de rue. Ce n’était pas pour autant que je m’étais habituée à tout. Ce pauvre réveil en témoignait, surprise par ce son strident de bon matin, dans un élan plutôt brutal pour me protéger de la menace, il avait pris un coup, la rencontre qui avait suivi avec le mur avait été fatal. Je tenterais de le réparer plus tard, j’étais déjà presque en retard.
Emmitouflée dans une épaisse écharpe de laine et un manteau confortable, j’avais trouvé le café sans mal. Ces connaissances volées me perturbaient encore, jonglant avec une vie qui n’était pas la mienne, tentant de raccommoder ces deux pans d’histoire qu’étaient la mienne et la sienne. Le pire était sans doute de ne pas savoir ou était les autres, ma famille, mes amis, l’ensemble de ma race. Je m’arrête devant la vitrine d’un magasin, observant ce reflet qui m’appartenait, qui était moi. Je constituais une expression de façade, expulsait toutes pensées superflues dans un souffle et entrepris de parcourir les derniers mètres qui me séparais du café. C’était un endroit chaleureux, bien qu’à la décoration sobre et surtout, avec une large gamme de choix sur leurs produits. Soyons honnêtes, je n’avais pas vraiment envie de rencontrer un nième client pour me parler de projet artistique dont je comprenais, sans comprendre, l’intérêt, par contre gouter toutes ses nouvelles saveurs éveillait mon intérêt. On se réconfortait comme on pouvait, surtout lorsqu’on avait constamment l’impression d’être un imposteur ayant volé l’intimité et la vie d’une autre. Et si j’arrêtais un instant de me voiler la face, il fallait reconnaitre que ce n’était pas tant une impression qu’une réalité. Le fait était, que non, je n’étais pas en joie d’y aller pour travailler, mais bien pour gouter ces boissons chaudes, exotiques pour moi, anodine pour mon enveloppe, mais pas pour moi Leucé, l’elfe.
Mon seul regret était de ne pouvoir tout commander d’un coup, sans paraitre pour une illuminée aux yeux des autres humains. Qu’ils pouvaient être barbant et mijaurée parfois et là je ne parlais même pas de mon ancien moi, coincée au possible et d’un ennuie mortel, empêtré dans une cage dont elle avait elle-même refermé la porte.
L’homme que je devais rencontrer était déjà là, déception de ne pouvoir découvrir l’endroit en paix, mais il fallait s’y faire et arrêter de regarder le monde avec des yeux de merlan fris. C’est donc tout naturellement que je m’installe à la table en le saluant poliment, tout en me présentant. Si nous avions déjà eu des échanges, enfin du moins, lui avec mon hôte, c’était la première fois qu’une rencontre était organisée. Il s’agissait de présenter des tableaux si je me rappelais bien, l’homme avait eu un timbre de voix qui l’avait intimidé. Il faut dire que des souvenirs que j’avais récupérés, un rien pouvait effaroucher Kaia, ce que je ne comprenais pas vraiment d’ailleurs. Je me mordis un instant la lèvre, ne sachant trop comment poursuivre cette conversation maintenant que les présentations d’usage étaient finies, puis je remarquais les dossiers rangés sur un coin de la table. « C’est pour moi tous ces papiers ? Vous me montrez ? Il faudrait aussi que vous m’expliquiez plus en détail ce que vous aimeriez faire exactement, le public visé, dans quel but et la charte graphique de votre site pour que les photos soient cohérentes avec ce qui a déjà été produit.» Je lance tout ça le plus naturellement du monde, lui lançant un sourire éclatant, mais concentrée sur la tâche. Une bulle éclata dans mon esprit, prise de conscience que Kaia n’aurait certainement été plus effacée et timide dans son comportement…mais … zut à la fin.
Caleb Odegärd
Dragon
réincarnation de : Samaël, illustre dragon et commandant d'une grande armée.
Caleb avait l’impression d’avoir été introduit subrepticement dans une pièce de théâtre. Une pièce désuète intercalée par inadvertance dans le roman décousu de sa vie. Son sourire s’étire face à cette comparaison des plus simplistes, alors qu’il dévisageait les pages d’Hamlet sans grand intérêt. Il avait lu et relu cette œuvre des centaines de fois depuis son arrivée dans ce monde. L’enchevêtrement des écrits et le déroulement de l’histoire le surprenaient à chaque fois. Il mordille sa lèvre inférieure et vient très lentement masser son nez en grimaçant. Une légère cicatrice le marquait avec une élégance que l’on loue habituellement aux petits caïds. Les stigmates de son précédent affrontement allaient probablement lui porter préjudice pour cette entrevue.
Il soulève lentement ses céruléennes pour balayer la salle du café d’un regard et s’arrête sur ta silhouette. Il ravale sa salive et, pour parachever le rôle qu’il se forçait à prendre, salua la demoiselle et entra dans le jeu des convenances. Elle était volubile, cette charmante demoiselle. Alors qu’il posait son coude sur la table et son menton dans sa paume pour l’observer tout en réprimant un sourire carnassier. Il hausse les sourcils et pousse les dossiers dans sa direction, sans même prononcer un mot.
De légers picotements caressaient sa nuque et son corps, ils n’étaient pas assez désagréables pour qu’il s’agisse d’un Dieu… pas assez familiers pour que ce soit une Valkyrie qu’il ait en face de lui. Il n’y avait donc que peu de possibilités. Il humecte ses lèvres et lève la main pour happer l’attention du serveur qui vint lui servir à nouveau un café et te déposer un chocolat chaud avec toute la décoration inutile que les humains adoraient ajouter.
« - Je me demande combien de temps tu tiendras ta parade. Loin de moi l’envie de te léser en t’annonçant que ces futilités ne m’intéressent plus depuis que tu es entrée. »
Il incline son visage en dédaignant le dossier d’un geste leste de la main. Certes, il avait besoin d’une photographe pour le site de cette profession d’emprunt et Harald le conjurait d’agir comme un humain normal. Mais ce n’était pas tous les jours qu’il rencontrait une créature. Tu semblais si naïve et innocente qu’il ne pouvait se résoudre à lancer une quelconque hostilité. Il préférait continuer à converser calmement afin d’analyser la situation et, au meilleur cas, découvrir qui se cachait sous ce visage chérubin.
« - Alors. Quelle créature ? Une louve serait plus féline. » Un sourire écorche ses lèvres, vite accompagné par un son cristallin qui se déploya dans sa gorge. Il passe sa langue sur ses dents et fit mine de réfléchir en roulant des yeux, sa main se posant sur la tasse chaude face à lui.
« - Ou alors on peut continuer à jouer cette mascarade et aller faire ces fameuses photos pour le gala qui s’annonce. Hm ? Loin de moi l’envie de te dérober un pan de ton activité favorite, mais je doute que tu puisses te complaire dans ce corps frêle et voué à la monotonie placide d’une humaine coincée. »
Il s’était renseigné sur ton compte avant de te rencontrer. C’était plus fort que lui, il devait tout analyser, envisager toutes les possibilités et garantir sa sécurité. Même s’il s’agissait d’une simple humaine, d’un marchand ou d’un client. Il devait avoir toutes les cartes en main avant de daigner s’aventurer dans ce monde et se complaire à la trame que le Destin avait profilé pour lui. Il n’avait hélas pas envisagé ce cas de figure. Tu n’avais rien de la gentille petite humaine au regard de porcelaine et à la lèvre tremblante, qui aurait baissé les yeux à son approche et rougit à la simple énonciation d’un « bonjour » un peu trop chaleureux. Cette entrevue s'annonçait beaucoup plus intéressante que prévu.
Kaia Vorn
Elfe de lumière
ORBES : 411
misères : 32
Lun 9 Nov - 17:49
Dire que je me prenais une porte était un euphémisme. D’une voix mordante, presque moqueuse, que ce qui me tient lieu de client me souffle le chaud et le froid dans les naseaux sans aucune pitié. Je fronce les sourcils, penchant la tête sur le côté en le fixant, vieille manie dont je n’arrivais pas à me défaire, comme si ainsi, je pouvais percer ce qui se cachait derrière ces yeux intraitables. Niveau entrée en matière, il y avait plus subtile, ménager mes nerfs ne faisait pas partie des prérogatives de ce type-là et je n’avais strictement aucune idée de comment réagir, ni même de ce que j’avais en face de moi. Ces propos étaient limpides quant à sa « non-humanité ». J’aurais presque pu me sentir vexer de me faire griller aussi facilement, si derrière je n’avais pas ressenti cet immense soulagement. Apparemment, j’avais eu besoin d’une confirmation à mes hypothèses. Non, je n’étais pas la seule dans cette galère monstrueuse, mais ne pas se retrouver en face de l’un de mes pairs était très décevant.
Je me rencogne dans mon siège, essuyant ces paroles cinglantes en croisant les bras, attendant qu’il finisse, clairement agacée qu'on me prenne de haut de la sorte. « Peut-être que se présenter en premier lieu serait une meilleure entrée en matière. Il semblerait que je n’ai pas tes capacités, tu m’excuseras pour ça. »
Je lui souris froidement, douchée par son approche, froissée également, mais surtout contre moi-même. Dans une forêt, personne n’aurait jamais pu me détecter, pas aussi facilement du moins, me faire ainsi remarquer sans même que je puisse donner le change était d’une frustration sans nom. J’étais une de chasseuse, pas une comédienne, mais tout de même étais-je si mauvaise pour m’adapter ? Par les neuf mondes, je n’aimais pas cet endroit. Je ne savais même pas si je devais être offusquée qu’on me prenne pour un putain de loup géant, puant et poilu ? Peut-être, mais leurs méthodes de traques restaient parmi les plus efficaces et ils étaient, malgré tout, de belle bête. Je décidais donc que non, je ne le prendrais pas mal.
Le seul réconfort que je trouvais fut dans cette boisson, chaude, sucrée et onctueuse. Ça, par contre, c’était intéressant, il y manquait peut-être un soupçon d’alcool, mais rien qu’y ne gâche réellement le goût. Je retirais, ce lieu n’était peut-être pas si pourri. « Dans le genre diplomate, on fait mieux. À ta convenance, du moment que je suis payée. Mais si tu passais moins de temps à m’insulter à demi-mot, on pourrait peut-être faire les deux, histoire de lier l’utile à l’agréable. Enfin c’est toi qui vois, mais je suppose que de ces photos tu en as quand même besoin mine de rien.»
Je le regarde en biais un instant, avant de reporter mon attention sur le chocolat et l’ignorer royalement. Il fallait que le premier réincarné que je rencontre soit aussi aimable qu’un caveau. Parfait, vraiment, le Destin avait un sens de l’humour douteux. « Et je ne suis pas si frêle, merci. »
Bon, si, peut-être un peu, mais je comptais bien y remédier. Je pense que je l’étais pour une humaine et par apport à une elfe n’en parlons même pas. Que c’était frustrant d’être essoufflée dès que je devais monter trois marches d’escalier ou d’être fatiguée au moindre effort. Cette femme, toute artiste qu’elle était, n’avait jamais vraiment pris le temps d’endurcir son corps. Tout comme son esprit, fragile, ce qui lui avait couté très cher…J’espérais simplement que sa forme discutable ne me serait pas préjudiciable également…
Caleb Odegärd
Dragon
réincarnation de : Samaël, illustre dragon et commandant d'une grande armée.
Et ses lèvres s’étirent lentement pour t’offrir son plus beau sourire. Il passe très lentement ses dents sur sa lèvre inférieure, tentant en vain de réprimer un nouveau rire. Céder à l’attraction qu’une telle rencontre pouvait susciter, serait fort heureusement conseillé… pourtant, il se retenait. Quelque chose en lui le poussait à te ménager et s’épargner un nouveau bras de fer avec une créature de son monde. Il en avait assez des affrontements inutiles et des débats stériles qu’inspiraient toutes ces rencontres sans intérêt. Il n’était pas question qu’il couve la vôtre d’un voile aussi insipide. Il racle sa gorge et pose ses coudes sur la table, joignant ses mains, comme si ce geste pouvait contenir toute l’exaltation qui faisait trembler ses membres.
« - Techniquement… » Il plisse les lèvres et se cambre tout en murmurant d’un œil guilleret : « - Nous avons déjà passé le moment des présentations et décliner mon identité ancestrale serait une erreur stratégique dont j’aimerais m’exempter. »
Après tout, sa réputation le précédait. Sa race à elle seule suscitait la méfiance. T’offrir sur un plateau toutes ces informations qu’il pouvait garder sous le sceau du silence serait bien indigne de son esprit. Il incline son visage et d’un sourire beaucoup plus léger, souffle entre ses lèvres :
« - D’accord. On va reprendre. »
Il humecte ses lèvres et s’installe confortablement sur son siège. Il redresse le menton, son attitude pouvait paraitre légèrement arrogante, peut-être un poil supérieur. Son aisance parmi les mortels lui conférait généralement une aura qu’on interprétait sous le fléau de « méprisant ». Il n’arborait pourtant pas l’aube d’un dédain à ton égard, seul l’amusement d’une situation des plus coquasses peignait ses traits. Les émotions n’étaient pas son fort, alors les traduire dans des termes plus appropriés s’avérait être difficile. Il reprit pourtant, d’une voix plus claire et plus rauque.
« - Je ne souhaite aucunement t’insulter ou profaner ne serait-ce qu’un millième de l’identité qui est tienne derrière… » Il te désigne d’un geste leste de la main tout en plissant les lèvres. « - Ton enveloppe ? Je ne sais pas comment on peut appeler ces corps d’emprunts sans nous insulter. Alors que les siècles et les légendes scandent nos noms avec toute la fascination que l’on mérite. »
Vous réduire à un artefact de chair et d’os sans l’ombre d’une puissance céleste était probablement le pire châtiment que les Dieux auraient pu vous infliger. Une seule y était parvenue et il lui vouait une haine viscérale. Mais la colère dont il était sujet ne s’arrêtait guère à ce petit détail anodin, dans le terrible néant que constituait sa propre existence. Il attrape sa tasse et fixe l’intérieur avec un intérêt feint. Réprimant un nouveau sourire, beaucoup plus contenu et respirant la bienséance que l’on allouait de coutume aux personnes de noble sang.
« - Tu sais. Être frêle peut avoir son charme. Tu peux en jouer pour tromper l’ennemi. Mais le fait que tu aies pu être vexée à ce semblant d’insulte me permet déjà d’avoir quelques réponses. »
Chaque geste était méticuleusement calculé. Chaque parole qu’il énonçait était choisie avec une attention qu’il offrait généralement à ses plus belles batailles. Parce que rien ne valait une victoire qui frappait avant même que le combat ne soit annoncé. Tu étais d’une race qui supportait mal d’être ainsi rabaissée par des termes plutôt anodins. Une race à la tenue exemplaire, qui portait le buste droit et une tête couronnée sans s’encombrer du faste d’un diadème. Il mordille sa lèvre inférieure et finit par souffler :
« - Tu parles de capacité… cela veut-il dire que les tiennes ne te permettent pas de nous identifier ? »
Intéressant. Il savait pertinemment que les Dieux possédaient ce pouvoir. Frodi le lui avait prouvé à leur première rencontre.
Kaia Vorn
Elfe de lumière
ORBES : 411
misères : 32
Mer 11 Nov - 10:40
Buvant tranquillement, je l’observe alors qu’il met les choses au clair. Je pouvais comprendre ce besoin d’anonymat, même si je le trouvais stupide. Nous finirions bien tous par tomber les masques, pourquoi faire ainsi durer le suspens ? Mais j’agissais par réciprocité et s’il ne le souhaitait pas, il n’y avait aucune raison que je joue franc jeu également. Je n’étais pas si naïve et nous avions aussi nos ennemis. Il ne devait pas être un loup, j’avais l’intime conviction que chaque race serait capable de se reconnaitre entre eux. Le contraire me paraissait d’une aberration totale. Un dieu peut-être ?
Je me détends quand il s’excuse ? Non, ce n’était pas tout à fait cela, mais je le prenais comme tel. Je n’étais pas d’accord avec tout ce qu’il disait. Je n’étais pas la seule à ne pas être à l’aise avec ce nouvelle enveloppe, mais il dénigrait clairement la race humaine. Elle n’était pas piteuse, mais…. Ce n’était pas nous, nos corps, nos réelles capacités. Nous étions estropiés et de la pire des manières. L’adaptation avait de quoi rendre chèvre et amère, j’en convenais, mais ces créatures n’y étaient pour rien. Elles manquaient simplement de maturité et de sensibilité, incapables qu’elles étaient de sentir la magie, ou les énergies qui reliaient les mondes, qui se diffusaient et pulsaient si joliment. Ne plus pouvoir entendre les chants du vent et ressentir le rythme des plantes en étaient presque douloureux et je n’arrivais pas à comprendre à quel point ils pouvaient vivre dans l’ignorance sans qu'ils se sentent incomplets, comment était-ce possible ? « C’est vrai que cette…transition nous a amputés, mais il faut faire avec, ce n’est pas comme si nous avions le choix après tout, ni comme s’ils en étaient responsables d’ailleurs. Ces réceptacles ont aussi pâti de notre retour, ce n’est pas sans heurt d’un côté comme de l’autre. Mais clairement c’est un sacré merdier…. Je me passerais bien de l’adulation si ça pouvait me rendre mon vrai corps »
Je soupire lourdement en faisant une moue de dépit, parler avec un autre réincarné me donnait un vague à l’âme, amplifié par la nature de cette chair si prompte à la mélancolie. J’avais envie de lui rétorquer que non, être frêle comme il disait n’avait rien d’attrayant et je n’étais pas de ces êtres charmeurs, tout de miel et de volupté, ces choses-là ne m’avaient jamais vraiment intéressée et l’ennemi se trompait dans la discrétion, dans l’ombre de fourré, là où il ne pouvait ni vous voir, ni vous entendre. Pas dans un face à face en lui faisait des grands sourires pour passer derrière son dos et lui enfoncer un couteau dans le cœur. Je m’abstenais néanmoins, il semblait bien trop perspicace pour en rajouter, même s’il devait déjà voir clairement dans mon jeu si maladroit. Mon terrain à moi était là où vos yeux ne pouvaient pas percer, non à discuter autour d’une boisson chaude dans un bras de fer doucereux aux paroles acérées. Je relève un sourcil, un sourire amusé perlant sur mes lèvres, ne pouvant m’y empêcher. « Tiens donc ? »
Qu’il sache ou non, après tout qu'est-ce que cela pouvait faire? Avant, nous n’avions à cacher notre nature, pourquoi le faire maintenant ? Je ferai face, qu’importe ce qui arriverait et le supporterait que la menace soit dissimulée ou évidente. « Et bien, il semblerait, sinon je ne me serais pas faite surprendre comme une vierge effarouchée. Il paraîtrait logique que nous ayons hérité de… reliquats » par les mondes que ce constat était frustrant et déprimant « De nos aptitudes d’antan. ».
Je détestais devoir poser cette question, démontrant mon ignorance et sans toute, exposant d’autant mon débarquement récent. Mais je devais savoir. « Est-ce que tu sais ce qui s’est passé ? Comment nous en sommes arrivés là ? » Une autre me brûlait les lèvres, mais j’en connaissais la réponse et je n’étais pas encore prête à en faire le deuil. À savoir, qu’étaient devenus nos mondes et pouvait-on récupérer nos corps.
Caleb Odegärd
Dragon
réincarnation de : Samaël, illustre dragon et commandant d'une grande armée.
La vie est la courte distance entre deux vides. On avance désespérément jusqu’à la chute inéluctable qui scellera la fin d’une existence dont nous connaîtront les beautés que de cette manière imparfaite : usées par un trop plein d’orgueil, filtrées par nos sentiments les plus abjects et dénués de toute pureté. La convoitise, le dédain, l’envie… la domination et la vanité. Ô, mais tu semblais exemptée d’un tel blâme alors que tes propos caressaient son oreille comme le ferait le chant d’une sirène. Il pourrait accorder tes paroles aux louanges que lui chantait son instinct, mais se fit violence pour ne pas agrémenter son expression d’un air mutin. Il incline son faciès, se repaît de l’innocence qui caractérisait tes traits. Ta peau diaphane brillait lorsque les rayons du soleil en arpentaient les méandres et il s’extasiait face à l’image que tu lui renvoyais.
Plus vous parliez, plus son esprit faisait le lien entre plusieurs races. Ta bonté, ta condition et le fait que tu puisses prendre la défense de ces Hommes dont ils usurpaient volontiers l’identité… le poussaient à croire que ton cœur, bien que battant en rythme avec les plus cruelles légendes, n’était pas enclin à se pétrir de la honte allouée aux méchants des contes.
« - Pour toi, il aurait mieux fallu que ton âme erre pour l’éternité, plutôt que de voler la vie et l’âme charitable d’une humaine au regard aussi doux que peut l’être celui que tu arbores ? »
Il hausse les sourcils, plisse les lèvres et réprime un sourire. Il ne se moquait pas, ne se riait pas de toi. Il arborait juste la seule expression qu’il parvenait à traduire, derrière son masque de sarcasme et frôlant sans jamais l’atteindre l’indifférence qui lui seyait à l’époque. Il passe très lentement sa langue entre ses lèvres. De toute évidence, tu n’étais pas prête à t’ouvrir à lui et il avait attisé assez ton intérêt pour que vous puissiez converser dans d’autres circonstances. Il se cale confortablement dans le fond de son siège et désigne ton chocolat chaud tout en lançant, d’une voix beaucoup moins mystérieuse et porteuse de plus de virilité qu’il n’aurait voulu y mettre :
« - Bois ton chocolat et on pourra aller voir ces fameux tableaux. Peut-être que ton œil artistique pourra m’être utile dans cette mascarade désopilante. Je n’y connais rien en art. »
Il mentait. À moitié. L’art était un concept abstrait auquel il se frottait depuis quelques jours et il glanait toutes les informations pertinentes autour de cette activité afin de pouvoir en comprendre l’essence. Mais quelque chose lui manquait. Au-delà de la théorie qu’il pouvait accumuler, c’est le ressenti et les émotions qui bloquaient. Il était conscient que son handicap sentimental allait lui rendre la tâche plus difficile. Ton âme elle, semblait pourtant pétiller d’une palette de sensations qu’il voudrait explorer.
« - Je ne connais que des légendes. Ce monde grouille d’informations contradictoires. Et tu devrais voir ce qu’ils pensent de nous. Je ne peux que t’offrir une réponse certaine parmi toutes les informations que je suis parvenu à récolter depuis mon retour. »
Il se cambre très lentement et te souffle dans une confidence feinte, un sourire au bord des lèvres pour dissimuler toute plaisanterie :
« - Nos âmes sont scellées dans des pages anciennes au seau divin. Alors je suppose qu’une déesse désirant échapper à son funeste destin s’est ainsi octroyée le droit de tous nous enfermer. »
Il plisse les lèvres, cette information était cruciale. Il te l’offrait en guise de bienvenue, en guise de charité qu’il ne possédait que très rarement. Il y avait ce quelque chose en toi qui attisait sa sympathie sans qu’il n’en comprenne encore l’écho. Un bref petit rire écorcha ses lèvres, lorsqu’il ajouta tout en accompagnant ses dires de gestes parasites :
« - Comme si l’on pouvait échapper à son destin. C'est ridicule. »
Kaia Vorn
Elfe de lumière
ORBES : 411
misères : 32
Mer 11 Nov - 21:45
Mes lèvres se serrent et je me raccroche à ses prunelles. Je repose tranquillement ma tasse sur la table impeccable. « Non, je n’ai pas dit ça. Ne nous voilons pas la face. J’ai choisi de prendre sa place et de l’annihiler. J’ai fait le choix de vivre plutôt que de m’effacer. Cependant, ils restent des dégâts collatéraux, comme le seraient les petits d’un animal abattu, incapable de survivre, inconscient de l'arrivé de la faucheuse pour eux aussi, car coupé de leur protectrice. » Et pourtant, cela ne nous a jamais empêchés de chasser, de tuer. Mais la mort, comme la vie se devait d’être respectée. Je ne me chercherai pas d’excuse pour ce que j’avais fait. Je le déplorais, mais l’instinct de survie et la volonté de continuer mon histoire prévalaient sur l’autre. Et si elle, Kaia, avait eu cette hargne, cette détermination, qu’elle avait été supérieure à la mienne, alors nous n’aurions pas cette conversation à l’heure qu’il était. La loi du plus fort serait toujours d’un poids considérable dans la balance des cycles qui maintenait nos univers à flot, sinon, le Ragnarök lui-même n’aurait plus aucune raison d’être.
Le sujet change et l’atmosphère se détend sensiblement. J’aurais pu râler et jouer les fiers tout en me levant pour partir voir ces fameuses peintures. Cependant, gâcher la nourriture n’avait jamais été mon truc, surtout avec ces saveurs qui semblaient être faites pour vous envelopper et vous cajoler les papilles. J’émets un grognement de protestations lorsque je l’entends continuer, riant presque. « Personne n’achète autant de tableaux pour en faire une expo où les vendre sans rien n’y connaitre. Là, je n’y crois absolument pas. »
Où bien, il fallait posséder une fortune colossale et un goût étrange pour le m’as-tu-vu. Il avait l’air bien trop strict et froid pour simplement vouloir se faire mousser ou laisser la chance guider la réussite d’une entreprise. Cela dit, j’avais toujours plus recherché la compagnie silencieuse d’une traque en montagne plutôt que celle des miens, alors de là à croire d’un coup connaitre ce qui pouvait se tramer dans la tête d’un être réincarné en un humain… Oui, il y avait un gouffre.
Il capte mon attention lorsqu’il commence à aborder le sujet qui m’intéresse, il faut dire qu’il ménage bien son effet. Je ne remarque qu’après que je penche encore la tête pendant que je l’écoute.
Un livre donc… Par les neuf mondes quelle énergie dépenser, quel troc avec l’univers, pour en arriver à un tel résultat. Tout cela pour ça, un répit, un souffle retenu pendant quelque seconde à l’échelle du Destin et de sa mise en branle. Je finis ma boisson, et me lève pour que nous puissions faire ce pour quoi nous nous étions rencontrés à l’origine. « Tu sais, je ne suis pas d’accord. L’action était stupide, vaine sans doute. Mais ne rien faire et courir joyeusement à sa perte est tout aussi con à mon sens. »
Car nous savions tous le résultat de ce Destin dont il parlait. Des querelles qui pouvaient être évitées, mais dont personne ne faisait rien, jouant la mélodie imposée avec ses fausses notes et ses ratés, saccageant sciemment l’orchestration pour que le rendu soit le plus catastrophique possible. À quoi bon connaitre la fin d’une histoire si c’était pour en suivre les pas tracés avec docilité, surtout pour un tel résultat. Il devait bien y avoir une solution pour éviter cette guerre stupide. C’était désespérant que de devoir subir sans rien y faire.
Je souffle, sentant mon esprit s’échauffer et partir dans tous les sens. Il n’était pas l’heure d’y penser. Pour qu’une pièce se joue, tous les acteurs devaient y être présents et je doutais que ce soit le cas. D’ici là, je devais surtout mieux appréhender ce monde et cette vie étranges. « Enfin bon, ce qui est fait est fait. Allons-y, on a encore du travail. »
L’air de l’extérieur, fraiche et cinglante, qui vient mordre ma peau m’apaise et me fait du bien. « Je te laisse me montrer le chemin. Ho et…merci pour les infos»
Caleb Odegärd
Dragon
réincarnation de : Samaël, illustre dragon et commandant d'une grande armée.
Un maigre sourire arpente la courbe de ses lèvres alors que son regard, d’un bleu n’ayant rien à envier à l’azur qui couve le monde chaque été, se parachevait de légers nuages de malice. Il racle ses dents contre sa lèvre inférieure et réprime un énième sourire, petite expression spontanée qu’il n’avait pas calculée et qu’il se plaisait à arborer en ta présence. Tu étais décidément surprenante. Alors qu’il te vouait une pureté que tu semblais mériter, tu la balayais d’un geste dédaigneux de la main tout en adoptant la douceur généralement attribuée aux bonnes âmes.
« - Je comprends ton point de vue. » Il plisse les lèvres et porte de nouveau son regard sur la tasse qui réchauffait ostensiblement ses mains. Il incline son visage et t’écoute, se débarrassant d’un contact visuel qui, visiblement, le trompait. Il ne devait pas s’attarder sur tes mimiques et l’apparence qui était tienne pour dénicher ta véritable personnalité. Il devait se concentrer sur ta voix et se détacher de tous les artifices que tu employais depuis ton arrivée.
Il émet un léger rire. Tu venais de souligner un point parfaitement pertinent concernant les tableaux et l’intérêt qu’ils étaient supposés susciter chez leur possesseur. Il relève alors son regard, penaud, dans le tien et arbore un énième sourire. Cette fois, aucune malice, seulement un léger amusement alors qu’il hausse les épaules comme pour te concéder ce constat et n’y opposer aucune objection.
« - Certes. Peut-être que mon corps était enclin à utiliser l’art pour satisfaire ses besoins plus primaires. »
Et cette plaisanterie au goût aussi douteux que son café âcre, le fit rire. Un son cristallin et dénué de toute amertume alors qu’il bascule sa tête en arrière et humecte ses lèvres, tentant de reprendre contenance. Décidément, il était bien trop relâché ces derniers temps et s’autorisait la plaisanterie avec trop de zèle. Il n’avait pas encore déterminé qui tu étais et si tu représentais un danger potentiel pour les desseins qu’il préparait.
Il inspire profondément et lorsqu’il descend à nouveau ses céruléennes dans les tiennes. Plus aucun brin d’amusement ne sillonne la vallée d’un regard ferreux. Il entrouvre les lèvres et fronce légèrement les sourcils, passant l’un de ses bras sur le dossier de son siège pour adopter une posture qui donnait l’illusion d’être plus nonchalante.
« - Es-tu naïve ou simplement stupide ? Fuir son destin a toujours été le meilleur moyen d’en précipiter la sentence. » Il incline son visage et son sourire ne porte plus l’éclat de son insouciance, tant il est finement calculé cette fois. Emprunt d’un mépris qu’il ne te vouait pas, mais qu’il destinait à ces dieux imbus de leur personne pouvant croire, ou avoir l’audace d’espérer, qu’un simple geste de leur part pouvait ainsi les exempter du châtiment qui leur était tous réservé.
Il lève les yeux au ciel et se redresse pour te suivre à l’extérieur. La brise fraiche de l’air ne parvint pas à distiller l’échauffement de son esprit. Cette conversation était beaucoup trop intéressante pour qu’il te laisse ainsi la fuir. Il continuait alors, les mains dans les poches pour se protéger de mouvements parasites.
« - Même les Hommes content ces récits. La mère d’Œdipe envoya son enfant à la mort et l’abandonna afin que la prophétie ne puisse s’accomplir et qu’il ne puisse arracher la vie à son père et finir avec elle. »
Il hausse les épaules et incline son visage en ajoutant : « - Que s’est-il passé ? » Il te désigne de son index et son sourire écorche ses lèvres, découvrant des dents blanches immaculées : « - Bingo. Il a tué son père et épousé sa mère. Parce que leur stratagème avait été écrit et que nulle ne peut échapper à son destin. Qui ose prétendre le contraire, soit damné de porter en lui tant de facéties. »
Il se demandait quelle était la vision que vous aviez tous de ce Ragnarok alors que les légendes étaient toutes réécrites et que des informations étaient altérées par les époques et les récits énoncés. Il ne pouvait croire que le Ragnarok soit la fin de toute chose, parce qu’il naitrait de ce fléau, une Ancolie magnifique, se dressant sur le champ de bataille où mille guerriers auraient péri. Le crépuscule des Dieux, c’est l’avènement pour les autres créatures. Les combats se multiplieront, Odin chutera et son trône vacant couvert de lierres offrira son pouvoir à qui pourra l’asseoir.
Les sourires qu’il affichait et retenait sans pour autant réussir à totalement les réfréner avaient un petit quelque chose d’adorable, adoucissant le tranchant de ses yeux et le ton – parfois- impitoyable de sa voix. Comme maintenant, une corde sensible venait d’être effleurée, semblait-il. En même temps, il y avait de quoi être en colère pour la situation et certains êtres devaient plus mal le vivre que d’autre, sans parler des égo qui pouvaient aller avec. C’était une sorte de mort qu’on nous avait infligée, sans pour autant finir correctement le travail. Une tentative bâclée en plus de ratée. Oui, vraiment il y avait de quoi être furieux, de n’avoir pas été plus pris au sérieux au point de nous avoir diminués ainsi. On nous avait privés d’une partie de nos identités, en faire le deuil n’était pas simple.
« Je ne te parle pas de le fuir. Mais de l’infléchir et d’en changer la conclusion. » Plutôt que de continuer de flatter nos fiertés pour provoquer une guerre inutile et meurtrière. Qu’y avait-il de glorieux dans la mort et le sang ? Ce besoin m'échappait. « Bien que je ne comprenne pas bien ce qu’il ou elle a tenté de faire. »
Et alors que nous cheminons dehors, que les pavés pâles d’une fraicheur qui commençait à glacer ce qui pouvait l’être, il insiste. Têtu ? Hm, peut-être. « Et n’est-ce pas précisément l’énoncée de cette prophétie qui a tout provoqué ? S’il avait tété éduqué de sorte que cela n’arrive pas, plutôt que de céder à la peur, plutôt que d’en préférer un pouvoir inutile. Mort, il ne sert plus à rien de régner. De toute façon, le gamin aurait été roi, où était le problème ? Et sa mère ? Si elle l’avait pris en charge elle-même, jamais il n’aurait ne serait-ce que songé à l’épouser. Le Destin n’est-il pas immuable justement parce que nous lui donnons ce pouvoir sur nous ?» Je soupire, écrasée par cette conversation et tous ces aboutissants, trop intimes, finalement, pour des inconnus même reliés par une tragédie commune. Les vérités cachées derrière nos mots nous étaient propres et certainement bien plus complexes à décrypter qu’il n’y paraissait, mais je ne voulais pas qu’il essaie et je savais que c’était précisément ce qu’il faisait. « Je dis simplement que, lorsqu’on vous annonce une fin atroce, hausser les épaules et continuer d’y aller en chantonnant….C’est de la folie. »
Surtout si cette folie menait à sa perte la totalité des autres mondes et races gravitant tout autour. « Je crois surtout que nous avons un certain gout pour le mélodrame et que nous aimons nous vautrer dedans. ». Et c’était aussi une façon de fermer les yeux sur nos propres ingérences, si une guerre complète et meurtrière devait éclater, c’est bien qu’il y avait un mécontentement qui ne cessait de croitre, au lieu d’en lisser les angles, d’apaiser les rancœurs, il était plus facile, apparemment, de s'armer plutôt que de reconnaitre ses fautes.
Je pile presque pour me retrouver devant lui, grand gaillard, je suis obligée de lever la tête pour que mes prunelles atteignent les siens. « Tu méprises les humains, mais tu les prends en exemple pour digresser sur le Destin, chose que même nous avons du mal à appréhender. Alors que nous sommes plus proches, sans doute, de son essence, qu’eux. C’est quand même assez hypocrite non ? » Je maintiens son regard un instant, avant de me défiler d’une pirouette, il ne fallait pas trop défier les dominants. Quelque chose dans ce gout-là.
Je parlais trop et ça commençait à me fatiguer, mais il dégageait quelque chose qui me forçait à réagir à ses propos. Je n’arrivais clairement pas à mettre le doigt dessus… Et si c’était un elfe noir ? Et si j’étais juste en train de me jeter dans la gueule du loup…
Caleb Odegärd
Dragon
réincarnation de : Samaël, illustre dragon et commandant d'une grande armée.
Il humecte ses lèvres, ses céruléennes contemplant le faste avec lequel tu te déplaçais. Il pourrait apparenter ta démarche à la grâce séculaire que vous possédiez sans doute, toi et les tiens. Hélas, il était loin de t’accorder un crédit aussi honorable. Il redresse le menton, fier que son petit stratagème puisse donner lieu à une conversation aussi porteuse de sens. Tu commençais déjà à te contredire et le fait d’être acculée te rendait presque couarde. Un large sourire dessinait la courbe de ses lèvres alors qu’il plongeait avec nonchalance ses mains dans ses poches, suivant la cadence de tes pas.
« - Tu as beau jouer avec les mots, cela ne rend pas moins inévitable leur sentence. »
Il secoue la tête, feignant le dépit qui n’eut pas réellement l’audace de ternir son enthousiasme. Il hausse les sourcils, et te dépasse. Reprenant sa marche simplement, afin de te guider jusqu’à l’entrepôt : sujet de cette rencontre, ou prétexte.
« - C’est ce que je t’ai dit. Qu’on tente ou non de le fuir, le destin est inéluctable. La fin reste la même, seul le chemin diffère. »
Il ne comprenait pas ce que tu entendais. Ton raisonnement lui paraissait même plutôt abstrait par rapport aux vérités dénuées de toutes ces breloques que les hommes aiment arborer comme le plus précieux de leurs biens. Il ralentit légèrement, devant le port et son regard se perd momentanément sur l’eau d’un bleu cristallin. Il dirige finalement son regard dans le tien et plisse les lèvres avant de t’avouer, dans un murmure presque inaudible :
« - Tu te trompes. Je ne méprise pas les hommes. » Il incline son visage et plisse les lèvres : « -Du moins, pas la totalité. J’ai conscience qu’il existe des âmes qui méritent ma reconnaissance et mon respect. Vouer mon existence à porter l’amertume d’un mépris sans profondeur véritable, ne ferait que porter offense à tout ce pourquoi j’ai sacrifié ma vie. Certains sont brillants. D’autres se complaisent dans une vie dénuée de sens. »
Il attend quelques secondes, peut-être quelques minutes, avant d’hausser les épaules et de sourire face à ta mine. Ta peau diaphane semblait être martelée par le froid, mais la morsure du vent n’enlevait en rien la douceur de tes traits. Ce constat était troublant et l’incitait à faire perdurer cette conversation, l’allonger… la distordre et finalement te faire oublier toutes tes croyances. Ces traditions bien ancrées chez toutes les espèces et qui guidaient aveuglément chaque être depuis des décennies.
« - Pour être tout à fait honnête. » Il reprend sa marche, te tourne le dos et s’avance, longeant le port sans plus accorder son attention aux vagues indolentes qui mouraient contre les coques. « - J’ai l’intime conviction que le destin est immuable, qu’il est le seul maître en ces lieux et qu’aucun homme, ou dieux, ne peut s’y soustraire… Mais.. »
Parce qu’il y avait toujours un mais, n’est-ce pas ? Il humecte ses lèvres et réprime un rire, bien vite résonnant dans son sourire ; « - Notre destin est désormais lié à celui de ce corps d’emprunt. Alors qui sait ce que l’avenir nous réserve désormais, hm ? »
Il t’accorde une oeillade et s’arrête devant un entrepôt, il sort enfin sa main de sa poche, munie d’un trousseau de clef. Il fixe une à une les clefs, et après une minutieuse analyse, pris la bonne clef et ouvrit la porte.
« - Je comprends ton désir de te battre contre la fatalité, mais la mort est inévitable. Alors pourquoi s’évertuer à la fuir, quand on peut décider de vivre pleinement l’instant ? »